Production laitière : Optimiser sa stratégie alimentaire et maîtriser son prix de revient
Le coût alimentaire compte en moyenne pour 37% des charges globales d’une exploitation.
Comment pérenniser la rentabilité des élevages ?
Dans un contexte de remontée « timide » du prix de base du lait, des conseillers Cerfrance confrontent leur point de vue.
Connaitre son prix de revient dans un contexte de marchés laitiers fluctuants
La remontée « timide » du prix de base du lait depuis quelques mois rompt avec deux années de baisse consécutive. Connaitre son prix de revient, c’est situer la rentabilité de sa production et se placer dans une dynamique de progression.
Chaque année, Cerfrance analyse les prix de revient de plusieurs centaines d’éleveurs laitiers. Les résultats présentés ci-dessous concernent les exercices comptables clôturés entre le 1er janvier et le 31 décembre 2016 d’exploitations ayant, en moyenne, les caractéristiques suivantes :
SAU |
85 ha |
Quantité de lait vendu |
442 000 litres |
Effectif et race des vaches laitières |
57 / PH |
Actifs équivalents temps plein |
1,8 |
Un prix de revient à 352 € / 1000 litres
Le prix de revient s’établit en moyenne à 352 € par 1 000 litres de lait vendus.
Il inclut, en plus des charges comptables, la rémunération de la main d’œuvre présente sur l’atelier laitier, et une rémunération des capitaux propres investis par l’exploitant dans sa production.
Le produit viande et les aides PAC sont déduits.
Coût alimentaire et charges de structure, principaux postes du prix de revient
Source : Cerfrance Mayenne - Sarthe
L’importance du coût alimentaire
Les charges opérationnelles s’élèvent à 183 € par 1000 litres et représentent 41% des charges constituant le prix de revient. Elles témoignent de la conduite technique du troupeau (alimentation, reproduction, sanitaire, etc).
Le coût alimentaire en est la principale composante. Il est lié, d’une part, à la quantité et à la qualité de la ration distribuée aux animaux par rapport à leurs performances techniques (niveau d’étable, TB et TP), et d’autre part, au prix des aliments et au coût des intrants pour la surface fourragère.
Le poids des investissements
Les charges de structure représentent 159 € par 1000 litres, soit 36% du total. Elles sont liées à des choix d’équipements (mécanisation et bâtiments) faits par le passé et aux charges fixes de fonctionnement.
Des écarts importants de prix de revient
Entre le groupe des 25% d’éleveurs ayant les prix de revient les plus élevés (quart inférieur) et celui ayant les prix de revient les plus faibles (quart supérieur), l’écart est de 71 € par 1 000 litres.
50% de l’écart sur la technique et le reste sur la gestion de la main d’œuvre et des équipements :
Avec des niveaux d’intensification des vaches laitières et de la surface fourragère mieux maitrisés, les éleveurs du quart supérieur optimisent leurs charges opérationnelles de 28 € par 1 000 litres.
Par ailleurs, pour un montant proche de charge de structure par actif, la productivité de leur main d’œuvre est supérieure de 40 000 litres par actif : le choix d’investir dans des équipements productifs et cohérents avec la main d’œuvre réduit le poids des charges de structure dans le prix de revient.
Confrontation du prix de revient avec le prix de vente
Sur les cinq dernières années, le prix de revient moyen est supérieur au prix de vente trois fois sur cinq.
Comparaison prix de revient avec le prix payé
L’année 2016 s’est révélée particulièrement difficile pour une majorité d’éleveurs car le différentiel prix de revient / prix de vente de 43 € par 1 000 litres ne leur a pas permis de rémunérer leur travail et leur capital.
Pour certains, la production de volumes complémentaires les années précédentes a montré ses limites : saturation de la capacité de financement et travail supplémentaire mal rémunéré.
Choisir la meilleure stratégie alimentaire
A l’heure où la maitrise des charges est essentielle pour pérenniser la rentabilité de l’élevage bovin, faut-il être plus autonome ou plus efficace ?
Avec 126 € des 1000 litres de moyenne, le coût alimentaire compte pour 37% des charges globales de l’exploitation.
Afin de l’optimiser, faut-il déjà se poser les bonnes questions :
- Quels sont mes objectifs de production et de condition de travail sur mon élevage?
- Si je souhaite être autonome, ai-je suffisamment de ressources ?
- Quelle efficacité à la sortie pour quelle rentabilité ?
L’AUTONOMIE SE RAISONNE SUR L’ÉNERGIE ET LA PROTÉINE
En exprimant le bilan fourrager en terme de kg d’UFL (énergie) et de PDI (protéine) nécessaires comparés aux kg d’UFL et PDI achetés et autoproduits, une exploitation laitière est en moyenne 80% autonome en UFL et entre 50 et 70 % en PDI.
Etre autonome peut être rentable avec la condition sine qua non d’une valorisation maximale des ressources fourragères ; incorporer de l’herbe oui, mais de l’herbe en quantité et de qualité pour permettre une réduction de la complémentation azoté. De l’énergie également, par la récolte au stade optimum de l’ensilage de maïs ou par l’autoconsommation de céréales en maîtrisant un risque d’acidose.
Etre autonome peut être rentable si les ressources de l’exploitation le permettent, avec quelques pré-requis essentiels : mon parcellaire est-il groupé pour permettre du pâturage ? suis-je prêt à y passer du temps ? faire une culture dérobée va-t-il pénaliser mon rendement maïs ? la valorisation de mes céréales va-t-elle impacter ma marge cultures de vente ?
Finalement, la question d’autonomie est une composante du système puisqu’elle influencera sur le poste charges.. qu’en est-il des produits ?
L’EFFICIENCE ALIMENTAIRE POUR MOINS DE GASPILLAGE
La définition classique de l’efficacité alimentaire est le lait produit par les kilos de matière sèche ingérés. En moyenne ce ratio est compris entre 1.25 et 1.45 kg lait / kg MSI.
La diversité des fourrages, les synergies entre la protéine et l’énergie, la concentration ou l’aspect physique de la ration, sont autant de facteurs alimentaires qui peuvent réduire un gaspillage alimentaire.
Pour 0,1 kg de lait par kg de matière sèche ingérée en plus, le gain économique sur la marge alimentaire est estimé entre 5.5 à 6 € /1000 L.
Au-delà de ce simple ratio, l’efficience alimentaire doit amener des interrogations sur le système global ; la production laitière, les taux, le produit viande, la reproduction, la reprise d’état corporel, le nombre de jours productifs..
Pierre Chambard : "Dans le contexte actuel de marchés laitiers incertains, toute décision stratégique (accroissement du volume, changement d’équipement, évolution de la conduite animale) doit être précédée d’une analyse chiffrée des résultats actuels."
L’outil prix de revient met en lumière dans sa globalité le fonctionnement d’un atelier et permet d’identifier l’impact économique des choix possibles sur un élevage.
Laurie Poussier : "Il n’y a malheureusement pas d’indicateur magique à donner, vu la complexité des systèmes polyculture-élevage. C’est en cela que les échanges de pratiques au sein des groupes d’éleveurs sont bénéfiques et complémentaires au calcul d'indicateurs.
Pierre Chambard : "Cerfrance va généraliser dès la rentrée la mise à disposition du prix de revient auprès de ses adhérents lors de la remise annuelle des comptes."
Laurie Poussier : "Cerfrance vous accompagne également dans des diagnostics technico-économiques de votre système lait et viande."
Pierre CHAMBARD Laurie POUSSIER
Chargé d’études Conseillère Systèmes Lait-Viande
pchambard@53-72.cerfrance.fr lpoussier@53-72.cerfrance.fr
Cerfrance Mayenne - Sarthe Cerfrance Mayenne - Sarthe